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Il était un Havre
Il était un Havre
  • Comme son nom l’indique, Le Havre fut d’abord un port avant de devenir une ville. C'est à la fois la plus récente des villes françaises et le benjamin de nos grands ports. Je vous propose un petit voyage dans le temps à la découverte de son passé.
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 Sauf indication contraire, toutes les cartes postales, gravures et photographies qui illustrent les messages de ce blog proviennent de la collection personnelle de l'auteur.

 

Mes romans

 

Couverture Emeutiers

Vous pouvez le commander en ligne :

www.editions-complicites.fr (4 euros de frais d’envoi), www.fnac.com, www.librairielechatpitre.com, www.armitiere.com, www.librairielabuissonniere.com, www.decitre.fr, www.rakuten.com, www.librest.com, www.leslibraires.fr.

 

Au Havre, il est en vente à la Galerne, à la FNAC et à Auchan Montgaillard.

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5 juillet 2020

La chaussée d'Ingouville

 

Pour répondre aux voeux exprimés par quelques lecteurs des "émeutiers du Grand Quay" qui ont regretté que le roman ne soit pas illustré de quelques images représentant les différents lieux et monuments qui en ont constitué le décor, et en ressentant moi-même de plus en plus l'envie, je dois vous l'avouer, je vous propose de (re) découvrir certains billets (revus et corrigés) publiés en d'autres temps sur ce blog et qui vous permettront, si vous le souhaitez, de visualiser ce Havre du XVIIIe siècle sur les pas des héros des "émeutiers". Puisque le roman débute à l'entrée de la ville, aux abords de la chaussée d'Ingouville, je vous propose que cette voie qui constituait à l'époque le seul moyen d'accès à la ville du Havre par la terre soit notre première étape...

 

 

21 Sur la côte d'Ingouville

Illustration ci-dessus : Le Roy sur la hauteur d'Ingouville, gravé par Jacques-Philippe Le Bas

(collection personnelle G.H.)

 

 

« L’homme de goût ne sauroit dédaigner la chaussée d’Ingouville, puisqu’elle offre le concours de ce que cette cité renferme de plus aimable, de plus distingué, de meilleur ton. Là, vers la fin des beaux jours, les élégants, les jeunes femmes, aiment à se trouver réunis. Ils s’asseyent sur des sièges disposés parallèlement à l’allée, ou se mettent en cercle. Dans ce brillant essaim, de tendres sentimens donnent aux visages, un air plus gracieux, aux regards, une expression plus animée, aux paroles, je ne sais quoi de plus agréable (1) », écrivait en 1825 Auguste-Prosper Legros, confirmant s’il en était besoin que la chaussée d’Ingouville ne manquait nullement de charme à cette époque et qu’elle était devenue un des lieux de promenade et réunion préférés des Havrais. Sa première apparition sur un plan du Havre remonte à 1530, mais il y a tout lieu de penser qu’elle existait déjà avant la création de la cité océane, puisqu’il s’agit selon toute vraisemblance du chemin qui menait du hameau d’Ingouville à la crique de Grâce et dont la partie sud donnera naissance à la grande rue Saint-Michel, notre rue de Paris.

Sur ce plan de 1530, elle était représentée sous la forme d’une route surélevée, traversant les marécages de la plaine, qui l’environnaient tout autant à droite qu’à gauche, seule possibilité à l’époque de joindre la ville naissante au village lové sur les premiers contreforts de la « Côte ». À l’ouest de la chaussée, très tôt bordée d’arbres qui en faisaient une longue voie ombragée, se dressent haut dans le ciel plusieurs moulins, dont la fonction, pour certains, consistait à assécher le marais. Nous avons déjà évoqué leur Histoire. Non loin de là, se tenait le couvent des Pénitents dont la première pierre avait été posée en 1661. C’était une fondation royale dont nous aurons l’occasion de reparler plus longuement. Plus loin, au milieu des marais, le pré de santé Saint-Roch. Nous en avons déjà longuement parlé aussi.

De l’autre côté, vers l’est, l’hospice général, transféré sur le site d’Ingouville en 1669, lorsque fut créé l’Arsenal du bassin du Roi, appelé quant à lui à devenir l’hôpital général du Havre. Devant l’hospice, passait le chemin encore imprécis qui deviendra la route Royale conduisant du Havre à Rouen. Nous en reparlerons. Au nord, au pied de la falaise, s’ouvrait la route de Montivilliers, elle aussi encore à l’état de chemin chaotique. Au bas de la côte, à l’amorce de cette voie qui se hisse au flanc de la falaise pour conduire les paroissiens jusqu’à l’église Saint-Michel, se tenait l’auberge de l’« Écu de France », construite au XVIe siècle. Elle nous est connue par des documents figurés. Elle a été démolie en 1839 pour permettre l’élargissement de la rue.

 

Modèle blog

En 1738, avaient été entrepris des travaux d’amélioration de la chaussée afin de la rendre plus praticable pour les moyens de transport « modernes ». « L’allée centrale, bordée de pierres de taille, est réservée aux voitures, écrit à ce sujet Claire Étienne-Steiner. Dans les allées latérales, les arbres taillés en berceau ombragent un grand nombre de bancs placés à égale distance. (2)». C’était alors devenu une magnifique promenade qui ne comptait pas moins de 800 arbres.

 

Ingouville

L’amélioration de ce trait d’union entre la cité océane et le hameau d’Ingouville changera-t-elle radicalement la vision qu’en avaient les bourgeois de la ville ? Ou, au contraire, est-ce parce que les dits bourgeois commençaient à s’intéresser de près aux charmes rupestres du petit bourg que la liaison, demeurée jusque-là plutôt chaotique, que l’on entreprit ces travaux ? Toujours est-il que, dans les années suivantes, les choses allaient changer du tout au tout. En 1747, la chaussée rénovée constituait le point de départ de la nouvelle route Royale qui allait relier Le Havre à Rouen. Puis, les uns après les autres, négociants et bourgeois, fuyant les bruits et la fureur de la ville (déjà !), émigrèrent vers la Côte à cause, nous dit-on, du climat malsain de la ville basse et des épidémies. Une première maison de négociant y avait fait son apparition en 1751. En 1755, on construisit un théâtre dans la demie-lune de la porte d’Ingouville. Un incendie le détruisit l’année suivante, faisant plusieurs morts. Sur le champ de foire, la future place Thiers, La foire Saint-Michel effectuait sa grande première en 1757, tandis qu’en 1769, le directeur de la Manufacture des Tabacs se faisait construire un pavillon, à l’emplacement occupé de nos jours par la Banque de France. En face, le négociant Pierre-Martin Foache fait construire la « Folie-Martin » sur un grand verger encore entouré de canaux. À l’amorce de la rue de Montivilliers, on avait construit en 1762 l’hôtel du Bras d’Or.

 

1) « Description du Havre, ou Recherches morales et historiques sur les habitans, le port et les principaux établissemens de cette ville », Auguste-Prosper Legros, 1825.

2) « Le Havre, un port, des villes neuves », Claire Étienne-Steiner, 2005.

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