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Il était un Havre
Il était un Havre
  • Comme son nom l’indique, Le Havre fut d’abord un port avant de devenir une ville. C'est à la fois la plus récente des villes françaises et le benjamin de nos grands ports. Je vous propose un petit voyage dans le temps à la découverte de son passé.
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Au Havre, il est en vente à la Galerne, à la FNAC et à Auchan Montgaillard.

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10 novembre 2018

Le Havre aux Anglais (2/2)

 

AbbayeL'abbaye de Graville

 

 

Le 4 octobre, à la tête d'une escadre de 6000 hommes et 300 chevaux, le comte de Warwick prend possession de la ville dont le vidame de Chartres lui a ouvert toutes grandes les portes. Warwick fait renforcer les défenses de la ville, et fait détruire tout ce que pourrait être à l'avantage d'assaillants soucieux de libérer la cité océane. À ce propos, Jean Laignel écrira en 1711 : « Durant leur séjour en la ditte ville, ils firent plusieurs fossés à l'entour d'icelle, abatirent l'église et la plupart des maisons de l'Heure et firent, disent les Mémoires, hausser le fort d'icelle qui n'est autre que les ruines de Percanville » (1). Sur le perrey, ils détruisirent aussi trois moulins « pour ne pas en laisser la jouissance à l'ennemi ». Le 30 octobre, sans doute pour s'assurer une meilleure maîtrise de la cité et de ses habitants, les soldats français encore présents dans l'enceinte de la ville sont expulsés.

Il faudra cependant attendre mai 1563 pour que Catherine de Médicis déclare nul et non avenu le traité d'Hampton Court et exige des Anglais la restitution de la place du Havre. Bien entendu, comme il fallait s'y attendre, elle se voit opposer une fin de non-recevoir ferme et catégorique de la part de la reine Elisabeth. Face à ce refus, les troupes françaises se positionnent devant la ville pour assiéger les Anglais. La reconquête du Havre est confiée à Charles de Condé-Brissac, maréchal de France. Il loge à l'abbaye de Graville. L'armée française campe du côté d'Ingouville et de Sanvic d'une part, et de l'autre, en la paroisse de Leure. Débute alors un long siège qui va durer plusieurs mois. « Il est probable que la conduite des eaux de Trigauville fut coupéepar le Maréchal de Brissac, lorsqu'il assiégeait le Havre, occupé par lesAnglais en 1563 », écrit Pierre-François Frissard dans son « Histoire du port du Havre » (2). C'est probablement ce qui précipita la reddition des Anglais dont les rangs furent décimés en l'espace de deux semaines par une épidémie de peste sans aucun doute consécutive aux privations d'eau et de nourriture conjuguées avec les fortes chaleurs du mois de juillet. Le 23 mai 1563, sous le vague prétexte qu'il leur faut aller défendre la ville de Rouen assiégée par l'armée de Charles IX, les Français, pourtant calvinistes convaincus, sont à leur tour expulsés de la ville. Peut-être Warwick craignit-il que la proximité des troupes françaises en approche du Havre ne les conduise à changer subitement de camp ?

 

Plan_Warwick

En face, les assiégeants étaient-ils au courant de la situation précaire qui était celle des troupes anglaises lorsque, le 12 juillet 1563, leur est déclarée la guerre par lettres patentes ? « Monseigneur le Connestable accompaigné de Messieursles Mareschaux de Montmorencyet de Bourdillon, et plusieurs Seigneurs et Chevaliers de l'ordre, arriva sur lesdix heures en l'abbaye de Graville, ou estoit logé monsieur le Mareschal de Brissac » (3). C'est dire qu'on est là en présence du plus haut commandement des armées royales. Les combats sont engagés le 24 juillet. Guillaume de Marceilles, le premier Historien du Havre, témoin de ces événements, raconte : « Une fois rompues et prises les palissades de bois qui étaient hors de la ville sur la jetée, près de la grosse tour, par le capitaine Richelieu, son régiment et le sieur capitaine Monnens, on amena près de la ville sur le perrey quatre gros canons de fonte avec force munitions de poudre et boulets. La grosse tour de la ville en fut si vivement battue depuis six heures du matin jusqu'à onze heures qu'une partie de la tour , quoiqu'elle soit fort épaisse, avait été abattue » (4). Pour résister aux assauts des troupes françaises, les Anglais n'hésitent pas à utiliser les canons en batterie au sommet de la tour de l'église Notre-Dame qui avait été élevée une vingtaine d'années auparavant.

 

Vitanval

Mais, épuisés et diminués, les occupants, dont les rangs ont été décimés par la famine et la maladie, n'ont d'autre solution que de rendre les armes. Le 29 juillet 1563, après 10 mois d’occupation anglaise, Le Havre est libéré à l’issue d’un siège où se sera particulièrement illustré le sieur de Sarlabos, ce qui lui vaudra d’être, très peu de temps après, nommé gouverneur de la ville. Les Anglais auront donc possédé Le Havre du 4 octobre 1562 au 29 juillet 1563. Les conditions de la reddition ont été négociées par le connétable de Montmorency, qui peut aller le lendemain à la rencontre de Charles IX et Catherine de Médicis alors établis à Fécamp pour leur annoncer la fin du siège. Deux jours plus tard, le roi et la reine-mère sont hébergés à Sainte-Adresse, au manoir de Vitanval. Ont-ils, comme souvent il est affirmé, et en dépit des risques encourus par une épidémie de peste qui y sévissait encore, visité Le Havre pour constater l'état effroyable dans lequel les occupants l'avaient laissée ? Il est permis d'en douter. Quoi qu'il en soit, entourés de leurs conseillers, leurs majestés prennent des décisions. Tout d'abord, celle, prise après bien des hésitations, de ne pas démanteler la ville comme il avait été envisagé un temps de le faire, et d'en conserver les fortifications. Il est également décidé de détruire le fort « Warwick » et d'abaisser de 30 mètres la tour de l'église Notre-Dame dont les canons avaient un temps menacé la réussite de la reconquête.

L’année suivante, écoutant là encore l’avis de ses conseillers, Charles IX charge l’ingénieur italien Jules César Spinelli de construire une citadelle en lieu et place de l’ancien quartier des Barres, « rejeté » en 1550 sur décision royale au-delà des limites de la ville. La raison d’être de cette forteresse ne laisse guère de place au doute : Il s’agit bel et bien de surveiller étroitement les Havrais en majorité demeurés fidèles aux idées de la religion réformée. Les canons de la nouvelle citadelle seront donc en tout premier lieu tournés en direction de la ville...

 

 

 

 

1) « Antiquitez du Havre de Grâce », Jean Laignel, (Hervé Chabannes et Dominique Rouet), 2010.

2) « Histoire du port du Havre », Pierre-François Frissard, 1837.

3) « Discours au vrai de la réduction du Havre de Grâce en l'obéissance du Roy », Robert Estienne imprimeur, 1563.

4) « Mémoires de Guillaume de Marceilles, La première Histoire du Havre », Hervé Chabannes, Jean-Baptiste Gastinne, Dominique Rouet, Yves Boistelle, 2012.

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Commentaires
F
Cette victoire a été célébrée par le compositeur Guillaume Costeley, musicien du Roy, dans une chanson intitulée "La prise du Havre" : Approche-toy, jeune Roy débonnaire, Du fier Angloys, pour le prendre à mercy, Et s'il ne veut pour à coup le deffaire, Laisse marcher le fort Montmorency. (Musique de Guillaume Costeley, Paris, A. Le Roy & R. Ballard, 1576).
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G
Bonjour…<br /> <br /> Bombardement… La ville connaît ce nom de la part des Anglais, pas toujours pour les mêmes causes, mais toujours avec les mêmes conséquences…<br /> <br /> Les guerres où l'eau est une arme de guerre : elles existent dans le monde !<br /> <br /> Quand les hommes finiront ils par s'entendre… ?<br /> <br /> <br /> <br /> A coup de traités, de conférence à l'ONU, etc... petit à petit la paix ferait elle son nid ? J'ose y croire encore…<br /> <br /> Merci pour cette page d'histoire, où les lieux du Havre sont bien présents comme l'abbaye de Graville, l'église Notre Dame, manquent la tour, les moulins, les douves et les remparts...
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H
Bonjour Gérard,<br /> <br /> Le siège du Havre aura pour conséquence que quelques années plus tard, en 1585, le gouverneur d’alors, André de Brancas, fera creuser un grand réservoir d’eau potable sous le logis du roi, afin de résister à un éventuel blocus de la ville. Comme quoi, parfois les guerres n’ont pas que des côtés négatifs.<br /> <br /> En tout cas bravo pour ce récit bien conduit.
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