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Il était un Havre
Il était un Havre
  • Comme son nom l’indique, Le Havre fut d’abord un port avant de devenir une ville. C'est à la fois la plus récente des villes françaises et le benjamin de nos grands ports. Je vous propose un petit voyage dans le temps à la découverte de son passé.
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Au Havre, il est en vente à la Galerne, à la FNAC et à Auchan Montgaillard.

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28 octobre 2018

Comme une lettre à la Poste (4/4)

 

img281L'hôtel des Postes inauguré en décembre 1926 (Collection G.H.)

 

L'année 1909 sera marquée par des grèves de postiers. Débuté à Paris le 12 mars, le mouvement, qui touche les télégraphistes, les agents des bureaux de poste, les postiers des services ambulants, les dames employées du télégraphe et du téléphone, les ouvriers des lignes, ne tarde pas à gagner les villes de province : Lyon, Marseille, Rouen, Lille et… Le Havre où la grève débute le 18 mars. Réactives, les entreprises havraises s'étaient organisées dans l'urgence pour tenter de remédier à cette totale inertie des services postaux, comme en témoigne cet extrait de « La poste au Havre des origines à nos jours » :« En raison des grèves des P.T.T., l'agence Fournier vient d'organiser un service de Paris au Havre et du Havre à Paris… Les lettres pour cette destination devront être déposées chez M. Perquer, 8, place Jules-Ferry, avant 6 h. Ce service donnera droit à une perception de 0 fr. 10 par lettre, lesquelles devront être affranchies au tarif ordinaire » (1). La grève, qui, contrairement au mouvement de mai 1899, avait affecté l'ensemble des services au niveau national, se termina le 24 mars.

Une seconde grève débute le 12 mai 1909. Même punition, même motif : Cette fois, c'est la Chambre de Commerce qui se charge de l'envoi et de la réception de la correspondance « commerciale ». Au bas de l'escalier de la Bourse, trois boîtes aux lettres sont disposées pour recevoir le courrier destiné respectivement à Paris, à la province et à l'étranger. Cette seconde grève de 1909 prendra fin le 18 mai. Plus de 800 postiers seront révoqués pour participation à un mouvement de grève qui, à l'époque, leur était formellement interdit par une loi qui avait été votée le 22 mars 1907 par le gouvernement présidé par Georges Clémenceau.

Alors que le monde faisait son entrée dans le XXe siècle, les effectifs de la Poste havraise comptaient 50 receveurs, commis et employés, et autant de facteurs. Mais le virage qui fait entrer la Poste havraise dans le XXe siècle est à nouveau synonyme, pour des services qui ont continué inlassablement à grandir et à s'étendre, d’exiguïté et de conditions de travail qui se dégradent. Et, déjà, au nom d'un meilleur service rendu au public, on commence, Municipalité en tête, à se poser la question de la construction d’un nouvel Hôtel de Poste. D'âpres négociations sont engagées entre le ministère et la ville du Havre. Consciente des enjeux et soucieuse du « confort » des usagers, cette dernière fait don du terrain qu’elle vient d’acheter, situé dans un quadrilatère borné par les rues Jules Siegfried, Duplex, Victor Hugo et Anfray, non loin du palais de la Bourse, et sur lequel était construit l’entrepôt des tabacs. Elle va même jusqu'à proposer de financer une construction qui, logiquement, devrait se faire aux frais de l’État. Après bien des palabres, encore et toujours, le projet de l'architecte de la ville du Havre, William Cargill, est finalement retenu.

 

Bout_Rond__1_

Hélas, il faudra encore quelques années pour que le projet voit enfin le jour, mais, hélas, ce qui apparaît à tous comme une nécessité et qui est dans toutes les têtes devra attendre encore un peu. Car la guerre qui éclate en août 1914 laisse le projet en suspens. Il est bien évident que l'on aura bien d'autres choses à penser et à faire durant cette sombre période. Ce sera sans doute aussi en raison du conflit qu'apparaissent, en 1914, les premières femmes facteurs. « Oui, à l’époque, on ne disait pas encore factrice. La féminisation des professions passe avant la féminisation du vocabulaire, mais là n’est pas le propos de notre billet du jour », précise mademoiselletitam in histoire sur le blog https://lecomptoirdetitam.wordpress.com (2). Ce ne sera du reste pas le seul secteur d'activité où les femmes occupèrent des postes traditionnellement occupés par les hommes. Dans les campagnes, elles se chargeront des travaux des champs. En milieu urbain, elles travailleront dans les usines ou elles occuperont des postes dans l'administration… Bien naturellement, Le Havre, dans ce domaine, n'échappe pas à la règle.

La guerre terminée, le projet du nouvel Hôtel des Postes est ressorti des cartons. Les travaux débutent vers 1920 et se prolongèrent six années durant. En décembre 1926, donc, ce superbe édifice de « style flamand » ouvre ses portes au public qui a l'heureuse surprise d'être d’accueilli dans un grand hall spacieux, dans des locaux où tous les guichets ont été regroupés pour être mis à sa disposition : courrier « privé » et commercial, boîtes postales, téléphone, télégraphe, profitant à l'occasion de toutes les améliorations dont bénéficiait le service des Postes dans l'ensemble du territoire.

En effet, un peu partout en France, les services postaux sont entrés résolument dans l'ère de la modernité, celle de l'époque s'entend. Les innovations se succèdent, s'enchaînent à une allure aussi folle que les années qui leur servirent de cadre. Le transport du courrier est effectué pour la toute première fois par avion entre Nancy et Lunéville (1912), les chèques postaux sont créés (1918), le sigle P.T.T. pour Postes, Télégraphes et Téléphone, usité depuis quelque temps pour désigner l'administration de la Poste est officiellement adopté (1925), un service de Poste Automobile Rurale est instaurée pour lutter contre l’isolement dans les campagnes (1926), la Compagnie Générale Aéropostale voit le jour (1927) et l'avion de Mermoz traverse l’Atlantique emportant le courrier de Saint-Louis au Sénégal jusqu'à Natal au Brésil (1930).

 

Postes_de_Graville

Le 1er septembre 1939 débutait la seconde guerre mondiale. La Poste du Havre et ses 110 receveurs, commis et employés, ses 105 facteurs, est totalement désorganisé par l'occupant. L'exode, qui touche Le Havre comme le reste du pays, complique encore plus une situation particulièrement difficile. Et les bombardements n'épargnent guère les bureaux de Poste des quartiers et des communes limitrophes. Le Havre principal est durement endommagé à plusieurs reprises, le bureau des Gobelins est détruit, celui de Graville sévèrement touché, ceux de Bléville et de Fontaine-la-Mallet sont en ruines. En dépit du danger permanent et des installations précarisées, des postiers assurent leur service. Ce courage et ce dévouement méritent d'être salués comme ils le méritent. Contrairement au palais de la Bourse, son voisin, l'Hôtel des Postes se sortira du terrible bombardement de septembre 1944 avec des dommages réversibles et pourra assez rapidement rouvrir ses guichets.

La paix revenue, la Poste reprend sa marche vers le progrès. Le 10 mai 1946, les services sont scindés en deux directions générales : la Direction générale des Télécommunications et la Direction générale de la Poste. L'arrivée de la 2 CV en 1950 est une nouvelle étape de cette modernisation, tout comme la création en 1960 du célébrissime logo, cet « oiseau flèche » symbole du messager. En décembre 1962, grâce aux postiers et Françoise Dolto, s'ouvre le « Secrétariat du Père Noël ». Le code postal à deux chiffres fait son apparition en 1965. Il sera suivi par celui à cinq chiffres quelques années plus tard, en 1972. Puis, c'est le premier TGV postal en 1984, la création du Chronopost en 1986, celle du Colissimo en 1989, l'ouverture à la concurrence pour les lettres de plus de 350 grammes en 1999. En l'an 2000, les facteurs sont près de 84 000 à distribuer chaque jour 66 millions de lettres et de paquets.

Au Havre, le bel immeuble de style de la poste principale, qui a subi quelques dommages durant les bombardements de la seconde guerre mondiale, a été remis en état dès 1947. Il sera à nouveau restauré vers 1995, « avec remise en valeur des façades, du fronton, colmatage des marques de la guerre… Travaux effectués en perspective d'une vente prochaine ? », s'interroge, avec un talent divinatoire que l'on appréciera à sa juste valeur quelques années plus tard, le rédacteur de « La Poste et Le Havre : Esquisse d’une Histoire de la Poste et des Postiers du Havre » (3).

En 1926, nous l'avons vu, tous les services avaient été regroupés dans le nouvel Hôtel de la Poste. Mais c'était compter sans les progrès des techniques qui, sans cesse plus performants, mais aussi sans cesse plus exigeants, allaient bientôt nécessiter de nouveaux équipements, et notamment de centraux téléphoniques. Le central téléphonique « automatique urbain », inauguré en 1926, est bientôt techniquement dépassé. Un nouveau central « interurbain » est installé en 1934 dans un immeuble spécialement construit à cet usage rue Jean-Baptiste Eyriès. En 1952, 2 ministres, 2 députés, 1 sénateur, des maires, des conseillers généraux, le préfet et le sous-préfet ont fait le déplacement pour inaugurer un nouveau central automatique, plus moderne et plus performant, installé dans ces mêmes locaux de la rue Jean-Baptiste Eyriès. Puis, démocratisation du téléphone oblige, ce sont de nouvelles installations qui sont inaugurées avenue Jean Jaurès en 1972, à Bléville en 1974, puis dans le quartier Saint-Vincent, rue Gustave Brindeau, rue des Marais…

En 1990, considérant sans aucun doute que la multiplication des bureaux de Poste dans les différents quartiers de la ville (Graville, Thiers, saint-Vincent, l'Eure, Aplemont, Caucriauville, Sanvic, Bléville…) et dans les centres commerciaux (Mont-Gaillard, Coty) ne justifiait plus l'existence du Havre principal, la direction de la Poste décida de vendre cet immeuble illustre et remarquable, fleuron des services postaux havrais. Réhabilité en 2007, le bâtiment devient la résidence de haut standing nommée « Le Vendôme ». Seules les façades extérieures ont été conservées alors que tout le reste a été entièrement reconstruit et restructuré.

 

 

Sources principales :

« La poste au Havre des origines à nos jours », Raymond Rousselin, Société Philatélique havraise, 1948.

« Hier, Le Havre, tome II », Jean Legoy, 1997.

 

 

1) « La poste au Havre des origines à nos jours », Raymond Rousselin, Société Philatélique havraise, 1948.

2) « Les premières femmes facteurs », mademoiselletitam in histoire, https://lecomptoirdetitam.wordpress.com

3) « La Poste et Le Havre : Esquisse d'une Histoire de la Poste et des Postiers au Havre », Le Fil Rouge, http://gilles.pichavant.pagesperso-orange.fr.

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Commentaires
J
Cet Hôtel des Postes abritait aussi deux importantes sociétés américaines de télégraphie qui exploitaient des câbles transatlantiques reliant Le Havre à New-York via l'Irlande et Terre Neuve, les sociétés Commercial Cable Company (CCC) et la Western Union (WU). http://atlantic-cable.com/Cables/LeHavre/index.htm
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H
Bonsoir Gérard,<br /> <br /> Je constate que nous sommes sur la même longueur d’onde, car de mon côté j’ai publié des articles consacrés à la construction de la grande poste ici, http://havraisdire2.canalblog.com/archives/2018/03/25/36207270.html<br /> <br /> et en ce moment je publie la construction du bâtiment lui-même ici :<br /> <br /> http://havraisdire2.canalblog.com/archives/2018/10/28/36799972.html<br /> <br /> En tout cas comme le souligne Gipi ton article est complet, et l’on suit bien l’évolution de ce service public cher à tous et que l’on ne voudrait pas voir disparaître.<br /> <br /> Bonne soirée Gérard.
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G
Vous avez fait là un superbe travail, facile à lire, instructif… On voit bien l'évolution des moyens, des besoins, des réalisations, des professions. C'est vraiment très intéressant. Merci Beaucoup . <br /> <br /> Geneviève
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