Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Il était un Havre
Il était un Havre
  • Comme son nom l’indique, Le Havre fut d’abord un port avant de devenir une ville. C'est à la fois la plus récente des villes françaises et le benjamin de nos grands ports. Je vous propose un petit voyage dans le temps à la découverte de son passé.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Information

 Sauf indication contraire, toutes les cartes postales, gravures et photographies qui illustrent les messages de ce blog proviennent de la collection personnelle de l'auteur.

 

Mes romans

 

Couverture Emeutiers

Vous pouvez le commander en ligne :

www.editions-complicites.fr (4 euros de frais d’envoi), www.fnac.com, www.librairielechatpitre.com, www.armitiere.com, www.librairielabuissonniere.com, www.decitre.fr, www.rakuten.com, www.librest.com, www.leslibraires.fr.

 

Au Havre, il est en vente à la Galerne, à la FNAC et à Auchan Montgaillard.

Newsletter
14 avril 2017

Le hameau du Bas-Sanvic

La rue d'EtretatLa rue d'Etretat

 

 

Bien avant la création du Havre, ce territoire qui répondait autrefois au nom de « Bas-Sanvic » fut occupé par les hommes. Les nombreux vestiges et artefacts que l’on y a retrouvés, dont certains remontent à l’ère glaciaire, sont là pour en attester. Au début du XIXe siècle, c’était un modeste hameau qui s’étendait autour de la mare aux Huguenots, cette vaste étendue d’eau qui couvrait jadis l’espace compris aujourd’hui entre le square Saint-Roch et la Porte Océane d’est en ouest, l’église Saint-Vincent et l’avenue Foch du nord au sud. Cette localité, qui préfigurait le futur quartier Saint-Vincent et à qui son implantation sur les contreforts de la « Côte » avait valu par ailleurs son second nom de « La Rampe », dépendait à cette époque de la commune de Sanvic qui couvrait une partie du plateau qui surplombait la plaine d’Ingouville et s’étendait jusqu’au rivage de la mer océane. Un rivage qu’ils partageaient avec les habitants du Chef-de-Caux, la future Sainte-Adresse, dont le village se dressait au pied du cap de la Hève. Et rien, ou presque, ne changera jusqu’au milieu du XIXe siècle…

Les gens qui habitaient le Bas-Sanvic, constitué pour l’essentiel de misérables baraques faites de bric et de broc, assemblage grossier des bois récupérés sur les épaves de navires échoués sur la grève, avaient pour la plupart deux métiers. Ils se disaient eux-mêmes pêcheur-tuilier ou briquetier-laboureur. Le contraste était saisissant entre les résidents du « Haut » et du « Bas » Sanvic. En haut, les « privilégiés » occupaient des terres arables et généreuses, et, en bas, les déshérités, les laissés-pour-compte, vivotaient de leurs activités de pêche et de débrouille. Deux mondes séparés par « la Rampe », la route de la « Côte », en fait le plus souvent un bourbier, qui conduisait les téméraires sur les hauteurs du plateau, comme en témoigne cet extrait du livre « Le Horsain », de l’abbé Alexandre, que nous rapportent Max Bengtsson et Gilbert Betton : « Au moment de la construction du Havre, la Rampe est restée à l’écart, c’était une zone insalubre balayée par les vents surtout du N.-O. La ville du Havre n’est réunie à ce lieu que par un mauvais chemin impraticable à marée haute 1»

Au XVIe siècle, les besoins en matériaux de construction suscités par l’édification de la nouvelle ville avaient été à l’origine du développement, tout au long du littoral, de tuileries et de briqueteries dont certaines étaient sans doute déjà présentes sur le rivage au moment de la création de la ville océane, comme le remarque Jean Legoy dans le premier opus de son « Hier, Le Havre » : « La fabrication des briques et des tuiles est une des plus anciennes activités du Havre et de sa région. Des tuileries existaient certainement en bord de mer avant même la fondation du Havre, tuileries qui se mirent à fabriquer des briques lors de la construction de la ville et de ses fortifications.2 » Le regain d’activité de ces galeries à ciel ouvert, qui donnaient à ce paysage marin et au hameau du Bas-Sanvic un petit air de zone industrielle, était incontestablement, dans ce village populeux d’une extrême pauvreté, pour nombre de ces pauvres hères, une opportunité propre à entretenir l’espoir d’une vie un (tout petit) peu meilleure. Autour de la mare aux Huguenots, l’activité de ces « usines » se poursuivra jusqu’au milieu du XIXe siècle.

Le boum économique et démographique qui allait soudain, vers 1850, faire exploser le carcan qui emprisonnait la ville du Havre de l’étreinte de ses fortifications depuis plusieurs siècles allait bouleverser le destin de cette petite localité. L’expansion de la cité océane et l’engouement de plus en plus marqué de la bourgeoisie locale pour le bord de mer se traduisirent par l’urbanisation du Bas-Sanvic qui sera annexé par sa puissante voisine en 1852. Et, en 1860, la décision fut prise d’aménager le quartier, à qui avait été donné le nom de cette nouvelle église dont la construction avait été entreprise en 1849 : Saint-Vincent-de-Paul.

En 1849, donc, avait été posée la première pierre d’une nouvelle église. Un édifice de 58 mètres de long qui va marquer symboliquement le centre du nouveau quartier et à laquelle fut donné le nom d’église Saint-Vincent-de-Paul. Elle est inaugurée en 1860, même si les deux tours de sa façade ne furent achevées qu’en 1882. Entre-temps, elle avait été cédée à la ville du Havre en échange de l’achèvement des travaux. Ce qui aura pour elle deux conséquences notoires, encore visible de nos jours : Sur le fronton de l’église a été gravé la devise : « Liberté, Égalité, Fraternité », ce qui n’est pas, à ma connaissance, chose courante pour un édifice du culte. La seconde conséquence, moins perceptible peut-être parce qu’on n’y prête finalement plus guère attention, c’est l’interdiction « ad vitam » d’édifier la moindre construction sur le parvis, entre le portail et la rue de l’Alma, une place sur laquelle se tiendra toutefois un marché dès la fin du XIXe siècle.

Lentement, au rythme des délocalisations des tuileries, des briqueteries, des verreries, qui, les uns après les autres, émigrent vers Sanvic, Graville ou la plaine de l’Eure, le front de mer se couvre de villas, de riches propriétés investissent les contreforts de la « Côte », des commerces s’implantent autour de la nouvelle place Saint-Vincent qui est aménagée et plantée en 1867. Une stèle est élevée sur la place à la mémoire du docteur Cousture, dont le dévouement et la générosité permirent à bien des miséreux du quartier d’obtenir les soins et le soutien moral dont ils avaient le plus grand besoin, et on avait inauguré en 1868 une rue à son nom. cette stèle disparaîtra en 1960.

L’urbanisation du quartier va se poursuivre jusqu’en 1890. Sur les anciens marais, de nouvelles voies avaient été tracées, des îlots voués à la construction s’étaient dessinés, de nouvelles maisons avaient été élevées, leurs façades et leurs jardins s’étaient ouverts sur les rues, des ateliers et des commerces avaient fait leur apparition rue d’Étretat, nouveau pôle d’animation du quartier. En 1863, est achevée la rue Saint-Vincent-de-Paul qui longe l’église et la place. En 1880, est créé le marché des Gobelins et, en 1890, est ouvert le bureau de postes des Gobelins qui sera détruit en 1944.

Toutefois, la pauvreté et la misère régneront encore longtemps sur le quartier, et les œuvres de bienfaisance y avaient toute leur place. En 1875, le docteur Gibert avait fondé un dispensaire pour enfants pauvres, où les démunis pouvaient bénéficier de douches, d’étuves, de piscines, de bains ordinaires et à vapeurs. Entre 1895 et 1900, un autre dispensaire fut construit au 45 rue du Rocher, aujourd’hui rue du Docteur Gibert, d’après les plans des architectes parisiens Louis et Alfred Feine. En mémoire au docteur Gibert, il portera le nom du médecin au grand cœur. Il disparaîtra sous les bombes en 1944.

Vers 1920, on construisit l’une des plus grandes salles de cinéma de la ville, « L’Alhambra ». Laissons Jean Legoy nous en parler : « La salle, construite dans le style mauresque par l’architecte Guiné, offre aux spectateurs 1.400 places assises et un promenoir en fer à cheval qui peut recevoir 600 personnes debout. Le plancher, établi en pente, assure une visibilité parfaite.3 » La 1ère séance de cinéma parlant y eut lieu en 1930.

Le quartier Saint-Vincent paya, lui aussi, un lourd tribut lors des bombardements de septembre 1944. Une partie de Saint-Vincent échappera toutefois à la destruction et, de nos jours, on peut encore y admirer de superbes maisons du XIXe siècle. L’église, fortement endommagée, sera réparée. On y célébrera les obsèques de l’ancien Président de la République René Coty en novembre 1962. Restaurée une nouvelle fois en 1996, elle sera inscrite l’année suivante à l’inventaire des Monuments Historiques.

1) « Saint-Vincent-de-Paul, quartier phare de la Porte Océane », Max Bengtsson et Gilbert Betton, 1999.

2) « Hier, Le Havre, tome I », Jean Legoy, 1996.

3) « Hier, Le Havre, tome II », Jean Legoy, 1997.

Publicité
Publicité
Commentaires
S
Monsieur Hatton,<br /> <br /> C'est déjà beaucoup les pistes que vous me donnez...merci beaucoup ! Effectivement si vos amis Sanvicais ont des photos dont ils acceptent de scanner ou m'envoyer je suis preneuse...Et je vais voir pour les ouvrages. <br /> <br /> Bonne journée <br /> <br /> Cordialement <br /> <br /> Sylvie Martin
Répondre
S
Bonjour, <br /> <br /> <br /> <br /> Mon père M. Francis Souday est né à Sanvic en 1942, je pense après recherche au 19 rue Césaire Oursel, aujoud'hui rue Roger Salengro. Il y a grandit. Ma grand-mère tenait une épicerie je pense à cette même adresse ou à proximité (Souday Germaine et Roger). <br /> <br /> Je suis à la recherche de photos de cette rue dans les années après-guerre avant qu'elle soit modifiée. Voire encore mieux de l'épicerie ! <br /> <br /> Auriez-vous ce genre d'archives ? ou pouvez-vous m'indiquer où je pourrais trouver cela ? <br /> <br /> <br /> <br /> Ceci est à des fins personnelles et privées afin de transmettre à mes filles, mon père n'étant plus là ! <br /> <br /> D'avance merci <br /> <br /> Cordialement
Répondre
A
bonjour<br /> <br /> vers 1849, avait été bâti la cité Dégenétais rue de l' Alma par Victor Dégenétais, un négociant. Peut-être avez-vous quelques renseignements sur cette cité ouvrière?<br /> <br /> merci<br /> <br /> cordialement<br /> <br /> AB
Répondre
G
Un quartier magnifiquement bien résumé sous votre plume... on y trouve la vie de toute part, celle des communes avoisinantes, celle des fortunés, celle des ouvriers, celle de gens au grand cœur, comme le Docteur Gibert... cela donne une âme à ce quartier... C'est très agréable à lire.
Répondre
Publicité