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Il était un Havre
Il était un Havre
  • Comme son nom l’indique, Le Havre fut d’abord un port avant de devenir une ville. C'est à la fois la plus récente des villes françaises et le benjamin de nos grands ports. Je vous propose un petit voyage dans le temps à la découverte de son passé.
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6 avril 2017

Le pré Saint-Roch

Square Saint-Roch

Le square Saint-Roch

 

 

 

Dans leur ouvrage « Saint-Vincent-de-Paul, quartier phare de la Porte Océane », Max Bengtsson et Gilbert Betton consacre un très long chapitre, extraordinairement bien documenté et particulièrement riche en informations, à l’Histoire du square Saint-Roch. Tout, ou presque, s’y trouve et c’est donc dans ce document d’une qualité rare que nous avons puiser l’essentiel de notre propos à son sujet. En adressant, bien entendu, aux auteurs, les compliments et les remerciements qui leur reviennent de droit en toute justice.

Cette Histoire, donc, avait commencé ce jour de l’an 1585 lorsque la municipalité avait fait l’acquisition d’un petit bout de terrain, un îlot de terre relativement solide et stabilisé, au milieu des marécages de la plaine d’Ingouville, un pré qui avait appartenu jusque-là à un certain Monsieur Pierre Thomas. Le but de cet achat hors les murs de la ville était d’y installer les pestiférés, à l’écart de la cité et de ses habitants. « Sur le terrain, relatent Max Bengtsson et Gilbert Betton dans leur ouvrage, fut construite une maison réservée pour le personnel, les malades quant à eux logeaient dans des abris faits de bric et de broc, la plupart en toile, les autres en planche qui portaient le nom de « calloges1 ».

On s’en doute, ces bâtiments ne firent jamais l’objet, pour des raisons que l’on peut aisément comprendre, d’une très grande attention et d’un entretien suivi et régulier. Aussi peut-on lire dans le fascicule des « Indicateurs du Patrimoine » consacré au port et à la ville du Havre : « Lors d’une épidémie au XVIIe siècle sont signalés plusieurs maisons pour les malades, une maison et un jardin proche la chapelle pour le chapelain, une maison pour le chirurgien, le tout en ruines.2 ». Toutefois, vers 1630, le lazaret connut quelques réaménagements notables. Il fut construit de nouveaux bâtiments et une chapelle fut édifiée, qui reçut le vocable de Roch, ce saint natif de Montpellier qui, dans la seconde moitié du XIVe siècle, guérissait, si l’on en croit sa légende, les maladies de peau et de toutes sortes de pestilence. En 1631, son clocher reçut une cloche que lui fit un donateur resté anonyme. Mais le pré de santé perdit sa raison d’être lorsque le nouvel hôpital, ouvert au pied de la côte d’Ingouville, qui avait, quelque temps auparavant, pris en charge l’administration du lazaret, décida d’assurer, vers 1670, l’accueil et la prise en charge des malades contagieux du Havre et de la région.

En 1742, le pré Saint-Roch et ses installations, devenu vétustes et menaçant ruine, fut mis à la disposition de la Manufacture des Tabacs. La chapelle, négligée depuis de longues années, cessa d’être dédiée au culte, et servit de poudrière au milieu du XVIIIe siècle. Alors que la flotte anglaise bombarde la ville en juillet 1759, il est probable que son clocher, qui servait parfois d’amer aux navires en approche du port, servit également de point de mire aux assaillants. Plusieurs projectiles, tirés du large, tombèrent autour d’elle, heureusement sans parvenir à l’atteindre.

« En 1772, nous dit Michel Éloy, la municipalité achète le pré de santé.3 » Vraiment ? Ne l’avait-elle pas déjà fait en 1585 ? Se peut-il qu’elle l’ait acheté deux fois ? Qui saurait le dire ? Quoi qu’il en soit, il s’agit cette fois d’y établir le cimetière municipal, un choix répondant au problème posé par la récente disposition qui était venue, à l’époque, interdire, pour des raisons de santé publique, l’inhumation les défunts en centre-ville, dans et autour des églises notamment, comme il était jusqu’à présent coutume de le faire. « Le pré Saint-Roch, ancien hôpital affecté aux maladies contagieuses, allait être converti en cimetière. Sa chapelle était accompagnée d’une chaumière servant d’écurie.4 », rappelle à ce propos Philippe Barrey dans son « À travers Le Havre d’autrefois », tandis que Auguste-Prosper Legros s’attarde à souligner le caractère humble, quasiment dénué et misérable, qui était celui du nouveau lieu de repos éternel des Havrais : « Le cimetière Saint-Roch, où sont déposées toutes les personnes, décédées au Hâvre (moins cependant les protestans qui en ont un ailleurs), n’est point susceptible d’attirer les regards du voyageur, parce qu’on n’y voit aucune tombe monumentale, et que les restes deshommes de mérite, qui certainement y furent déposés, n’ont rien là qui puisse rappeler leur honorable carrière.5 ». La chapelle, laissée à l’abandon ou livrée à d’autres fins que sa vocation initiale, est rendue au culte en devenant chapelle funéraire. Elle seramolie en 1861, quelques années seulement avant que les corps des défunts ne soient transférés au nouveau cimetière municipal Sainte-Marie, sur le plateau au nord-est de la ville.

En 1868, donc, le pré Saint-Roch cesse d’être cimetière municipal. La décision est prise de le transformer en jardin public. On y aménage un jardin d’horticulture, avec bassins, grottes de jardin et jardin botanique où furent données un temps des cours d’horticulture. En 1869, Gustave Lennier fait construire un aquarium, semblable à celui qui avait été l’une des grandes attractions de l’exposition maritime du boulevard François 1er, un aquarium qui, lui-même, avait été inspiré par les célèbres grottes de Fingal en Écosse. L’aquarium du jardin Saint-Roch est inauguré le 1er août 1869. Il sera démoli en 1891. On peut en lire une description dans le catalogue illustré de l’exposition du Port autonome du Havre publié en 1927 : « Cet aquarium édifié en remplacement de celui qui figurait à l’exposition maritime de 1867, fut inauguré en 1869. Il était comme le précédent dirigé par Gustave Lennier, conservateur du Musée d’Histoire Naturelle (…) Il avait l’aspect d’une grotte composée de rochers jaunâtres. Dans l’intérieur, s’allongeait de chaque côté, un suite de grands bacs vitrés contenant des poissons, animaux marins et plantes marines de toute espèce.6 »

En 1887, le jardin s’était doté d’une nouvelle attraction : Une petite voiture tirée par deux chèvres promène les enfants dans le parc. Succès assuré ! Immédiat ! En 1895, un curieux trépied fait son apparition au bord du lac. Il s’agit en fait d’un fanal « qui se trouvait au départ de la jetée sud, au-dessus de l’écluse de chasse de la Floride, non loin du brise-lame d’Harcourt », et dont la fonction consistait autrefois à signaler aux navires l’ouverture de l’écluse7. En 1899, on inaugura dans le jardin un kiosque à musique. Son excellente acoustique et sa position surélevée permettaient au public de profiter pleinement des concerts qui y furent donnés. C’est dans le square, illuminé, que voit le jour, le 17 mai 1921, l’Harmonie Municipale du Havre. Cette année-là, le square prend le nom de « Jean Jaurès ». Au fil du temps, des bustes viennent ornementer les allées du jardin : Robert de la Villehervé, André Caplet…

Le jardin, totalement détruit, ou quasiment, par un déluge de bombes en septembre 1944, n’est plus que « monticules de terre, arbres abattus, profondes excavations, bassin disparu, kiosque à musique tordu.8 » Dans l’urgence, il retrouvera, durant quelques mois, son ancienne fonction de cimetière. Dans les années qui suivirent, les promeneurs retrouvèrent les bustes de Jules Tellier et de Robert de la Villehervé. En 1946, le monument « Idylle rustique », était transféré des jardins de l’Hôtel de ville, où il avait eu la chance extraordinaire d’échapper aux bombardements, vers le square dans lequel on peut encore le voir de nos jours. En 1953, le jardin Jean Jaurès, réaménagé par Auguste Perret en personne, reprend son ancien nom de « Square Saint-Roch ». Les chèvres qui tiraient autrefois la petite voiture qui promenait les enfants ont été remplacées par un âne qui aura, après sa disparition, deux successeurs.

À la fin du XXe siècle, le square est devenu ce splendide parc, véritable oasis de verdure en plein centre-ville, où se font photographier chaque semaine les enfants, les familles et les mariés. En 1996, on commence l’édification d’un nouveau kiosque à musique, appelé à remplacer l’ancien disparu sous les bombes du 5 septembre 1944. Malgré la pluie, il sera inauguré le 10 mai 1997 par un mémorable concert de l’Harmonie Municipale.

1) « Saint-Vincent-de-Paul, quartier phare de la Porte Océane », Max Bengtsson et Gilbert Betton, 1999.

2) « Le Havre, ville, port et agglomération », Indicateurs du Patrimoine, 1999.

3) « Le Havre de 1517 à 1966, 2.500 dates au fil des années », Michel Éloy, 1967.

4) « À travers Le Havre d’autrefois », Philippe Barrey, Commémoration du IVe centenaire du Havre, 1916.

5) « Description du Havre, ou Recherches morales et historiques sur les habitans, le port et les principaux établissemens de cette ville », Auguste-Prosper Legros, 1825.

6) « Le Havre de Grâce et ses navires », catalogue illustré de l’exposition du Port autonome du Havre, 1927.

7) « Hier, Le Havre, tome II », Jean Legoy, 1997.

8) « Saint-Vincent-de-Paul, quartier phare de la Porte Océane », Max Bengtsson et Gilbert Betton, 1999.

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Commentaires
G
Bonjour, Monsieur,<br /> <br /> Merci pour votre message et je vais essayer de répondre à vos questions aussi précisément que possible.<br /> <br /> Tout le quartier saint-Vincent était, jusqu'au milieu du XIXe siècle, à l'extérieur de la ville et était rattaché à la commune de Sanvic (on l'appelait le bas-Sanvic). La commune d'Ingouville, sur laquelle avait été construit le premier hospice-hôpital (vers 1667) sur l'emplacement actuel de l'hôpital Flaubert, a été rattachée au Havre en 1852 (en même temps que le bas-Sanvic et une partie de Graville).<br /> <br /> Les premières fortifications (XVIe siècle) s'élevaient (grosso-modo) à l'ouest sur le tracé du boulevard François 1er, au nord sur un axe est-ouest à hauteur (toujours grosso-modo) de l'actuelle rue Richelieu, et à l'est sur le quai Casimir Delavigne.<br /> <br /> Le plan Lamandé, qui ne fut totalement réalisé qu'après la Révolution de 1789, repoussa les remparts à 500 mètres au nord. Le boulevard de Strasbourg et l'avenue Foch (même si cette dernière n'occupe pas tout à fait la place qu'elle avait avant-guerre) ont été tracés sur les vestiges de ces seconds remparts.<br /> <br /> Voilà, j'espère que je suis parvenu à répondre à vos interrogations. N'hésitez pas à me recontacter si vous le souhaitez pour d'autres renseignements.<br /> <br /> Bonne fin de journée. Cordialement,<br /> <br /> Gérard Hatton
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D
bonjour, est-il possible de connaitre l'évolution des limites de la ville du havre par rapport à la première existence du coin saint roch, puis de l'hopital a Ingouville ( vers 1670) puis de l'hopital Flaubert rue thiers ?
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K
Bonjour, de toute façon si la chapelle,<br /> <br /> Saint Roch aurait échapper à la démolition envisagé. Elle aurait été détruite en 1944. Ironie du sort un cimetière provisoire avait été installé à la suite de la guerre.
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