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Il était un Havre
Il était un Havre
  • Comme son nom l’indique, Le Havre fut d’abord un port avant de devenir une ville. C'est à la fois la plus récente des villes françaises et le benjamin de nos grands ports. Je vous propose un petit voyage dans le temps à la découverte de son passé.
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Au Havre, il est en vente à la Galerne, à la FNAC et à Auchan Montgaillard.

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14 mars 2017

Le plan Lamandé

LLa place Louis XVILa place Louis XVI et le bassin du Commerce

 

 

C’est en 1783 que l’ingénieur François Laurent Lamandé est nommé ingénieur en chef des ports de Normandie, avec la mission de prendre en mains les nombreux travaux qui y sont projetés : Rouen, Dieppe, Fécamp, Saint-Valéry, Honfleur et, bien entendu, Le Havre. À cette époque, l’homme a déjà derrière lui une solide carrière qui l’a conduit aux Sables d’Olonne, à Montauban et à Paris, mais c’est au Havre qu’il va donner la pleine mesure de son talent.

Dès 1786, il présente aux notables et aux échevins de la ville un plan d’agrandissement du port et de la ville. Lamandé y préconise l’extension de la ville vers le Nord, le déplacement des fortifications, le creusement de deux nouveaux bassins, la démolition partielle de la citadelle pour permettre le creusement de l’un d’entre eux. Autour de ces nouvelles installations portuaires, il organise l’agrandissement de la ville, notamment dans la plaine d’Ingouville qui, à l’époque, en dehors de la chaussée surélevée bordée d’arbres qui conduisait jusqu’au bourg voisin, n’était encore que prairies marécageuses. Ce qui est remarquable, mais dont, bien sûr, nul ne se doutait à l’époque, c’est que ce projet va conditionner dans les années à venir toutes les évolutions de la ville et du port.

Même si le plan de ce monsieur Lamandé ne manquait pas d’atouts à bien des égards, ce que personne ne contestait, il avait semé malgré tout chez les édiles de la ville une certaine gêne, car ceux-ci avaient approuvé et validé, pas plus tard que l’année précédente, le projet qui leur avait été présenté par un certain sieur Dubois, projet qu’ils avaient pris soin de faire approuver par l’Académie des Sciences.

Loin de se laisser abattre, Lamandé persiste pour faire adopter son plan qu’il estime mieux répondre aux attentes de la cité et de ses habitants. N’avait-il pas, après tout, été nommé à ce poste par le souverain lui-même, et investi par ce dernier de lettres de mission qui lui conféraient autorité et légitimité pour accomplir son dessein. Se voulant conciliant, il va cependant proposer un nouveau plan qui se veut être la synthèse de celui du sieur Dubois, d’un autre projet qui avait été présenté par l’ingénieur de la Marine Jean-Baptiste Degaulle, et qui avait été écarté au profit de celui de Dubois, et du sien. Lamandé obtient le soutien du duc d’Harcourt, gouverneur de Normandie, et du ministre Calonne, et, finalement, le roi Louis XVI lui-même opte pour l’adoption du projet. Vexés et sans aucun doute quelque peu frustrés, ses opposants contre-attaquent : « Le plan Lamandé entre immédiatement en application, ce qui n’empêche pas les auteurs des projets évincés de revenir à la charge en critiquant les travaux – à la suite de Degaulle, dès 1787, cinq mémoires émanant de la commune, du commerce, des capitaines et des pilotes. Ils profitent même de la Révolution pour dénoncer un projet soi-disant imposé par l’ancien régime.1 », écrit Claire Étienne-Steiner.

En dépit de ces petits désagréments, la concrétisation du plan Lamandé se poursuivra durant quelques mois encore. On ne s’étonnera pas que, la priorité absolue ayant été accordée au commerce, le premier chantier mis en œuvre ait été celui du bassin d’Ingouville, le futur bassin du Commerce. Il débute en 1788. Les troubles et les guerres de la Révolution, celles de l’Empire et des soucis financiers, obligeront le chantier à une longue phase de somnolence. Ils ne redémarreront qu’au début du XIXe siècle pour s’achever véritablement vers 1830 avec la création du marché Louis-Philippe.

La ville et le port prennent alors un tout nouveau visage. Les nouveaux quartiers sont lotis, les nouveaux bassins sont opérationnels, une nouvelle porte d’Ingouville permet d’accéder à la rue de Paris prolongée, une autre, celle des Pïncettes, nouvellement créée, s’ouvre sur le glacis du Perrey, une troisième, la porte d’Harfleur, future porte Royale, dévoile aux voyageurs qui arrivent par l’est une vue nouvelle sur les bassins. La grande place Louis XVI, future place Gambetta, a été ouverte, un grand théâtre y a été inauguré. Plus loin, à l’ouest, un autre place a été créée, la place Louis-Philippe, et elle accueillera quelques années plus tard, les Halles Centrales. Au bout de la rue de Paris, face à l’avant-port, s’élève le nouveau Musée-Bibliothèque. Nous reviendrons dans les chapitres suivants sur ces différentes métamorphoses que Le Havre doit pour tout ou partie à un certain Monsieur Lamandé et qui l’ont fait entrer, et avec la ville ses habitants, dans une nouvelle aire, une étape cruciale de son développement.

Hélas, à l’heure où chacun pouvait se féliciter que les différents travaux mis en œuvre soient enfin arrivés à leur terme, l’embellie et l’enthousiasme allaient faire long feu et la réalité, cruelle, implacable, indéniable allait rapidement s’inviter dans le débat, car, de nouveau, les installations du port s’avéraient notoirement insuffisantes. De nouveau, la ville étouffait dans l’étau des nouvelles fortifications. Conséquence de ce navrant constat : Sans nier toutes les avancées obtenues par la mise en œuvre du plan Lamandé, il fallait d’ores et déjà envisager et étudier de nouveaux agrandissements portuaires et urbains, et ce dans un avenir rapproché. Mais, cela, c’est une autre histoire dont nous reparlerons, bien sûr, un peu plus tard.

 

 

1) « Le Havre, un port, des villes neuves », Claire Étienne-Steiner, 2005.

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