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Il était un Havre
Il était un Havre
  • Comme son nom l’indique, Le Havre fut d’abord un port avant de devenir une ville. C'est à la fois la plus récente des villes françaises et le benjamin de nos grands ports. Je vous propose un petit voyage dans le temps à la découverte de son passé.
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Au Havre, il est en vente à la Galerne, à la FNAC et à Auchan Montgaillard.

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4 mars 2017

La saga du port

L'entrée du port 1L'entrée du port

 

 

Au début du XVIe siècle, les bateaux de pêche qui trouvaient refuge dans cette branche de la crique qui donnera naissance à l’avant-port du Havre y accédaient par un chenal situé à l’est, non loin de la fosse de Leure. La mission confiée à l’amiral du Chillou consistait donc à fermer la passe d’origine et à ouvrir un passage dans le perrey qui fermait la crique à l’ouest, créant ainsi un accès direct à la mer, suffisamment large pour permettre le passage des plus grands navires de l’époque. Au sud, les accumulations de sable, d’alluvions et de galets avaient formé un long perrey qui tiendrait lieu, du moins le temps que fussent réalisés les travaux, de digue naturelle.

Le bassin du Roi 1

Les travaux furent entrepris dès le mois d’avril 1517. Ce ne fut pas chose aisée, car les éboulements fréquents dus à l’inconsistance des sols, accentués sans cesse par le travail de sape des marées, étaient un frein permanent à l’avancement des travaux. « Munis de simples pelles et de pioches pour creuser, d'écopes pour puiser l'eau, de brouettes et de civières pour les transports, les travailleurs des environs amenés par corvée et les pionniers bretons se heurtent à d'énormes difficultés. On ne peut rencontrer le terrain solide qu'à une grande profondeur, la moindre tranchée doit être étayée, le sol n'ayant aucune consistance. », relève Jean Legoy dans « Les Havrais et la mer1 ».

Néanmoins, même si la nature du terrain et les intempéries ont terriblement contrarié le bon déroulement du chantier, celui-ci était suffisamment avancé pour qu’en 1520 il fût possible d’y faire entrer la grande nef royale « L’Hermine ».

Capture 7

La passe était pourtant relativement réduite. Tout juste 32 mètres de large, flanquée des deux jetées fraîchement maçonnées par les compagnons de Michel Feré. L’Histoire de la « Grande Françoise » illustre à la perfection tout à la fois l’étroitesse de la passe et le déficit de tirant d’eau de l’avant-port au XVIe siècle. Dans le même temps qu’il ordonnait le début du chantier qui ferait naître le port du Havre, François 1er, déterminé à disputer au royaume d’Angleterre la suprématie maritime, avait décidé d’y faire construire la plus grande nef qui ait jamais navigué. Un géant des mers, en quelque sorte. Du moins pour l’époque, il va sans dire. Guillaume de Marceilles dont le père, très probablement, l’a vu de ses propres yeux, nous en a laissé une description assez précise dans ses « Mémoires » : « Trois rangs de sabords, deux gros mats, trois misaines à l’arrière, une chapelle, un jeu de paume, une forge, un moulin à vent et une « maison » construite en bois.2 » Mais l’affaire allait se corser lorsque, quittant la fosse de Leure pour gagner la haute mer, la « Grande Françoise » entreprit de traverser l’avant-port. En dépit de multiples tentatives, toutes aussi vaines les unes que les autres, la grande nef restera immobilisée à hauteur de la tour François 1er. Ramené finalement dans la fosse qui l’avait vu naître, le vaisseau sera démantelé sur place. Les matériaux ainsi récupérés seront réutilisés à la construction de maisons du quartier Saint-François.

Capture 15

Donc, au commencement, le havre de Grâce, voulu par François 1er, se limitait en tout et pour tout aux seuls avant-port et bassin du Roi qui avaient tous deux épousé les contours de la crique de Grâce. Cet espace naturel, par trop restreint, devait très rapidement atteindre ses limites. L’agrandir et le moderniser allaient très vite devenir une impérieuse nécessité qui ferait appel à l’audace et à l’ingéniosité de quelques hommes avisés, même si l’on peut regretter que certaines de leurs décisions aient porté atteinte à des éléments essentiels du patrimoine historique et culturelle de la cité océane. Cela allait se faire progressivement, par paliers successifs, par a coups même, s’échelonnant sur de longues années, au fur et à mesure que de nouveaux besoins, que de nouvelles exigences, se faisaient jour.

Dans une première tentative d’agrandissement de l’avant-port, la tour Vidame, qui avait été construite en 1562 face à la tour François 1er et qui permettait en tendant une chaîne entre les deux tours de contrôler l’entrée du port, avait été démolie en 1783. Mais l’espace réservé au port s’avérait encore par trop exigu. Il devient plus que nécessaire, voire urgent, de l’agrandir. Jean Legoy, dans son ouvrage « Les Havrais et la mer », rapporte « qu’à la fin du XVIIIe siècle, les navires, de plus en plus nombreux, devaient patienter souvent de longs jours en rade avant d’obtenir l’autorisation d’entrer dans le port. Et qu’il fallait même parfois faire tirer les canons de la tour François 1er pour ramener à la raison les capitaines les plus impatients, les plus virulents.3 »

Bassin de la Barre

img420

L’ingénieur Lamandé, dont le plan avait été validé par Louis XVI en personne, va alors faire son entrée en scène. Il prévoit l’agrandissement de l’avant-port en empiétant sur l’estuaire et en construisant une série d’ouvrages qui en facilite l’accès. Pour lutter contre l’accumulation des galets qui menacent toujours et encore le trafic maritime, le plan Lamandé prévoit la création d’un petit bassin de retenue à l’est (de la Floride), longeant les remparts de la Citadelle. Par ailleurs, on se souvient que, des trois criques qui avaient donné naissance au havre de Grâce, deux avaient été aménagées, l’une en avant-port et l’autre en bassin (du Roi). La troisième avait été laissée en l’état, ou presque. On y avait juste agencé un bassin de retenue dont la libération des eaux avait vocation à chasser les alluvions et les dépôts de galets dans l’avant-port. Lamandé y fait creuser un bassin à flot. Ce sera le bassin de la Barre. Une autre facette de son plan pour agrandir les capacités d’accueil du port consistera à creuser le bassin d’Ingouville, le futur bassin du Commerce, le long des remparts nord de la ville. Un percement qui, pour le coup, nécessitera la démolition d’une large partie de ces remparts. Mais les difficultés financières, encore et toujours, puis la Révolution de 1789, vont retarder un temps les travaux commencés en 1787.

Finalement, les nouvelles installations seront inaugurées vers 1820. Cette année-là, l’avant-port a été agrandi sur l’estuaire, la digue prolongée, un « arrière-port » a été créé plus à l’est et les nouveaux bassins entrent en service. Nous y reviendrons plus en détail un peu plus tard…

 

 

1) « Les Havrais et la mer », Jean Legoy, Philippe Manneville, Jean-Pierre Robichon, Erick Lévilly, 1990.

2) « Les mémoires de Guillaume de Marceilles, la première Histoire du Havre », Hervé Chabannes, Jean-Baptiste Gastinne, Dominique Rouet.

3) « Les Havrais et la mer », Jean Legoy, Philippe Manneville, Jean-Pierre Robichon, Erick Lévilly, 1990.

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Commentaires
G
C'est très agréable à lire... et je sens que je vais passer un joli moment à plonger ainsi dans l'histoire si bien racontée...<br /> <br /> En ce moment, je fais, en aquarelle et en encre, l'histoire de notre Ville du Havre et des années avant 1517... puis ce sera après 1517. Mes pinceaux (non historiens.. et ma tête qui n'a aucune formation en ce domaine) essaient de retracer ces histoires et mes petits enfants sont très heureux de trouver ces histoires de leur ville...<br /> <br /> Me permettez-vous parfois de citer votre blog pour mieux éclairer mes aquarelles... ?
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