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Il était un Havre
Il était un Havre
  • Comme son nom l’indique, Le Havre fut d’abord un port avant de devenir une ville. C'est à la fois la plus récente des villes françaises et le benjamin de nos grands ports. Je vous propose un petit voyage dans le temps à la découverte de son passé.
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6 février 2017

Les deux Sanvic

 

SanvicL'église de Sanvic (Image extraite de l'album "Vues du Havre")

On s’interrogera sans doute encore longtemps sur les véritables origines du nom de Sanvic. Présence saxonne pour les uns, – « Si nous voulions émettre ici une étymologie pour Sanvic, nous adopterions l’opinion des historiens locaux qui nous ont précédé et qui ont conclu à une ancienne colonie de Saxons, Saxonus Vicus, bien antérieure à l’arrivée des Normands »1 –, implantation viking pour les autres, – « Il semble hors de doute que Sanvic est un nom d’origine scandinave, qui a été donné par les Normands du Nord, conquérants de notre pays, et qui signifie : Baie au sable2. Il doit donc remonter au IXe siècle de l’ère chrétienne »3 – Ne pourrait-on pas mettre tout le monde d’accord et accepter l’idée que ce nom résulte tout simplement d’un mixte des deux origines ?

 

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Quoi qu’il en soit, son nom est formellement mentionné dans une charte signée en 1035 de la main même du duc Robert de Normandie. Sanvic était, à l’époque où Le Havre s’apprêtait à surgir des marais de l’estuaire, un village qui présentait deux visages radicalement différents. Le premier, au nord d’Ingouville, culminant sur le plateau à une centaine de mètres au-dessus du niveau de la mer, était désigné communément sous le nom de « Haut » Sanvic. C’était une bourgade constituée de petits hameaux épars, de terres arables et d’une population de cultivateurs.

 

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Les habitants y ont élevé, à une date qu’il est impossible de déterminer formellement une modeste chapelle dont on a, nous dit Alphonse Martin4, retrouvé les traces en 1610 et qui étaient encore visibles en 1861. Ce dont on peut être sûr, par contre, c’est que cette chapelle était bien présente en 1035, puisque, dans une charte portant ce millésime, le duc Robert de Normandie en confie le patronage à l’abbaye de Montivilliers. À quelle époque fut-elle placée sous le vocable de Saint-Denis ? C’est là une autre question pour laquelle nous n’avons pas à ce jour trouvé de réponse. Une antique légende prétend que les habitants de Sanvic et du Chef-de-Caux se partagèrent les reliques du célèbre martyr de Montmartre, dont la tête, jetée dans la Seine, était venue s’échouer sur le rivage normand. Si, avec toutes les réserves que l’on se doit d’émettre en ce qui concerne toutes les légendes, si cela se révélait être vrai, cela ferait tout simplement remonter l’existence de Sanvic au IIIe siècle.

 

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Le second, le « bas » Sanvic, était une étroite bande de terre qui s’étirait en descendant depuis le haut du plateau jusqu’au bord de la mer et dont les habitants vivaient essentiellement des produits de leur pêche. Au début du XVIe siècle, les besoins sans cesse plus importants de la ville du Havre en gestation de matériaux de construction, conduisirent à la création de nouvelles briqueteries et de nouvelles tuileries dont la matière première était extraite des marais du rivage du Bas-Sanvic, qui vinrent s'ajouter à celles qui existaient déjà, comme le souligne Jean Legoy. « Dès le XVe siècle, a écrit ce dernier5, les terrains en bordure de la mer (Sanvic descendait alors jusqu’au rivage) et au Chef-de-Caux sont exploités pour la fabrication des tuiles et des briques ». Souvent, du reste, les habitants exerçaient simultanément deux professions et il leur arrivait de se dire « pêcheur-briquetier » ou « laboureur-tuilier ». Et Alphonse Martin de préciser : « On peut citer la famille Godin, qui avait fait des générosités à l’église, et dont l’un des membres se qualifiait de laboureur et de tuilier au XVIe siècle6 ».

Au début du XVe siècle, ce même rivage de Sanvic fut sans doute le théâtre d’une farouche bataille que se livrèrent Français et Anglais pour la possession de la ville d’Harfleur, considérée par les uns et les autres comme la clef de toute la Normandie. Le 13 août 1415, l’armée anglaise débarque sur la plage et le combat s’engage « dans les marais à deux lieues d’Harfleur ». En croisant les mémoires et autres chroniques de l’époque7, il apparaît que les marais en question se situaient à proximité du Chef-de-Caux. Or, il se trouve qu’à deux lieues d’Harfleur, près du Chef-de-Caux, se trouvent précisément les marais du Bas-Sanvic.

Enfin, il reste un autre mystère à élucider. C’est celui de ce « port de Sanvic », mentionné par M. Letellier8. « Henri V fit boucher le port de Sanvic avec ses nacelles remplies de pierres », écrit-il dans ses « Recherches historiques sur la ville d’Harfleur ». Mais sans doute s’agit-il là tout simplement d’une confusion avec le port du Chef-de-Caux, dit « port aux bateaux », dont les installations, abritées dans l’anse du cap de la Hève, devaient, il est vrai, se trouver relativement proche du rivage du Bas-Sanvic.

Le « bas » Sanvic deviendra, lorsqu’il sera absorbé par la grande ville voisine, le quartier Saint-Vincent.

1) « A propos de Sanvic », Alphonse Martin, Recueil de la Société Havraise d’Études Diverses, 1908.

2) « sand » signifie « sable » en anglais, mais aussi en suédois, de danois, en norvégien. « vik » en suédois, « Vig » en danois et en norvégien se traduit par « baie », « anse ».

3) Sanvic, Sandouville, Oudalle », F. Acher, Recueil de la Société Havraise d’Études Diverses, 1908.

4) « Sanvic avant 1900 », Alphonse Martin, 1877.

5) « Le peuple du Havre et son Histoire », Jean Legoy, 1983.

6) « IVe centenaire du Havre – Origines du XIIe au XVIe siècle », Alphonse Martin, 1917.

7) Notamment les Mémoires de Lefebvre de Saint-Rémi, hérault d’armes du duc de Bourgogne, et la Chronique de Naguerel, historien français, chanoine et archidiacre de Notre-Dame de Rouen, cités par Alphonse Martin (« Glanes historiques sur Le Havre et son arrondissement », 1878)

8) « Recherches historiques sur la ville d’Harfleur », M. Letellier, 1841.

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